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Derrière la mise en scène, la voix de la réalité

Derrière la mise en scène, la voix de la réalité
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Par Soraya Hélou

On ne l'espérait plus, tant l'opposition syrienne s'était fait tirer l'oreille, mais la conférence de Genève 2 s'est bel et bien ouverte hier à Montreux. Le moment est sans doute solennel et reste porteur d'espoir, surtout pour les Syriens en Syrie ou dans les pays d'accueil qui le suivent avec émotion. S'il est vrai que nul ne peut s'attendre à grand-chose dans le contexte régional et international actuel, l‘élément positif de cette conférence est sans conteste la reconnaissance par le monde entier que la solution ne peut être que politique. L'autre élément positif c'est la participation officielle d'une délégation du régime syrien présidée par le ministre des Affaires étrangères Walid Moallem, qui apparaît comme une reconnaissance de son rôle dans l'avenir de la Syrie, surtout après l'opposition d'abord des Etats-Unis et de la France et ensuite de l'Arabie saoudite et de ses protégés au sein de l'opposition, à une telle participation.

C'est d'ailleurs en victorieux, mais soucieux du sort de son pays, que le ministre Moallem s'estDerrière la mise en scène, la voix de la réalité adressé aux représentants des 30 pays invités à la Conférence de Genève, prenant largement son temps pour exposer la situation et les origines du conflit, dénonçant les parties arabes et étrangères qui ont contribué, sinon causé, à ce bain de sang et rappelant que la solution ne peut être que syrienne et elle passe par une lutte généralisée contre ce terrorisme à visage islamique qui ravage la Syrie. Théoriquement, les intervenants avaient un droit de parole de 7 minutes qui pouvait être prolongé jusqu'à dix. le ministre russe des Affaires étrangères n'a parlé que 5 minutes, et le secrétaire d'Etat américain 7 minutes exactement, mais Walid al Moallem a parlé pendant 35 minutes. Au secrétaire général des Nations Unies qui le rappelait à l'ordre à l'aide d'une sonnerie qu'il avait justement installée pour limiter le temps de parole, il a répondu sèchement : «vous vivez à New York. Nous sommes sur le terrain en Syrie». Autrement dit, il faut nous laisser parler et surtout nous écouter puisque c'est nous qui recevons les coups et c'est notre pays qui est détruit. Sans la moindre complaisance, et dans un langage somme toute bien peu diplomatique, Walid Moallem a raconté les méfaits et les horreurs commises par les factions de l'opposition qui, selon lui, ont apporté la honte à la Syrie, à travers la barbarie de leur action, mais aussi parce qu'elles ont trahi leur pays, en acceptant l'aide de l'étranger, son argent et ses combattants pour détruire leur propre pays. Cet homme à la longue carrière diplomatique (il avait été ambassadeur de son pays à Washington) n'avait pas habitué ses interlocuteurs à exprimer ses sentiments. Il était au contraire connu pour son pragmatisme, voire sa froideur. Mais devant les délégations participant à la Conférence de Genève 2, il a parlé avec émotion des souffrances du peuple syrien dues à la volonté de certains pays voisins d'en changer le régime. Il a développé les horreurs commises par les combattants takfiristes qui cherchent à détruire le tissu social syrien et les composantes de l'Etat en se battant sous la bannière de l'opposition. Et, sans prendre des gants, il a ouvertement accusé les dirigeants saoudiens, qatariens et turcs d'avoir attisé le feu en Syrie, sans atteindre toutefois leur objectif, à cause de la solidité du régime syrien, de la cohésion de l'armée et du soutien de la population, toutes confessions confondues. Walid Moallem a parlé en position de force, car même les protagonistes de Genève sont obligés de reconnaître les avancées des forces du régime sur le terrain, sur tous les fronts, de Qalamoun à Damas, jusqu'à Alep. Les forces du régime apparaissent donc plus cohérentes que jamais face à une opposition qui se déchire et qui, dans les régions passées sous son contrôle, n'a pas réussi à convaincre les Syriens en leur donnant un modèle de pouvoir milicien, barbare et sans la moindre vision d'avenir.

Au point que cette opposition, en abritant dans ses rangs les groupes les plus extrémistes du monde, venus des quatre coins de la planète est devenue une menace pour les pays d'Occident, en tête la France, l'Allemagne, la Belgique et la Grande Bretagne. Les Européens reconnaissent eux-mêmes avoir 2500 combattants en Syrie, dont 550 Français (une grande partie d'entre eux sont des mineurs) de l'aveu même du ministre français de l'Intérieur Manuel Valls. Et ces pays commencent à appréhender sérieusement le retour de ces combattants dans leurs pays afin d'y mener des attaques terroristes. C'est pourquoi la plupart d'entre eux a repris contact avec les forces du régime dans une tentative de coopérer en vue du règlement de ce problème grave. Toutes ces données en mains, Walid Moallem a donc parlé appelant les délégations présentes à se rallier autour des forces du régime syrien pour former une large coalition contre le terrorisme takfiriste aveugle et barbare. Ce thème ne peut laisser personne indifférent, même ceux qui sont hostiles au régime syrien. Et l'appel de Moallem a résonné longtemps dans la salle de conférences de Montreux, bien après que le ministre syrien ait achevé son discours. Dans ce contexte, les appels à la chute du régime «pour cause de répression féroce» lancés par le chef de la délégation de l'opposition Ahmed al Jarba et par son parrain, le ministre saoudien des Affaires étrangères l'émir Séoud al Fayçal semblaient complètement décalés, voire hors sujet. Si le régime s'en va aujourd'hui, qui parviendra à endiguer les takfiristes ? D'autant que depuis bientôt un mois, le Front islamique qui regroupe, avec l'argent saoudien, des factions de l'opposition, tente d'éliminer Daech (créée avec les mêmes fonds mais devenue encombrante) sans y parvenir... Que serait-ce alors si le régime syrien disparaissait ? Même l'occident ne veut même pas y penser. C'est dire combien les choses ont évolué depuis le déclenchement de la crise syrienne... A Montreux, tout ce qui se dit n'est donc pas réalité. Il s'agit plutôt d'une mise en scène pour sauver la face des perdants. Seul Moallem a parlé au nom du peuple syrien et ce peuple, l'a justement entendu.

Source : Al-Ahednews

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